1. Souvenirs, souvenirs…
En 1920, quand Louise quitte sa campagne de Ruca pour venir s’installer à Erquy, le bourg n’a pas l’aspect d’aujourd’hui. Tu-es-Roc est plus peuplé que le centre, la rue Foch n’est pas encore la rue commerçante que l’on connaît. La principale voie est plutôt la Grande Rue que l’on vient de rebaptiser rue Clémenceau.
Louise, qui est alors veuve du docteur Benoit, découvre l’arrivée des premiers véhicules à moteur. Ces bolides devaient traverser la commune en trombe car le conseil municipal de l’époque, alors présidé par M. Dobet, se voit obligé de limiter la vitesse de ces engins à 20 km à l’heure dans Erquy.
Il faut savoir qu’en cette période d’après-guerre, c’est également le conseil qui fixe le prix du pain qui est cette année-là de 0,90 franc le kg.
Louise est surprise par l’arrivée de ces nouveaux moyens de locomotion, elle qui, à Ruca n’avait qu’un superbe vélo à 3 roues conçu par son grand-père, bricoleur de génie.C’est l’époque de l’arrivée du chemin de fer : une ligne relie Yffiniac à Erquy. La gare de Balino est ouverte à l’emplacement de la caserne des pompiers. Une ligne entre Lamballe et Pléneuf fonctionne et l’on espère un prolongement jusqu’à Erquy, avec une gare à Caroual. Louise emprunte souvent le petit train pour retourner dans sa campagne natale faire provision de beurre et légumes et retrouver ses amis à Hénanbihen où elle était écolière.
En 1926, les villas sortent de terre à Caroual qui deviendra une station de vacances très prisée et très animée quelques années plus tard.
Louise va rencontrer Joseph, originaire de Pléneuf. Joseph a pour grand-père le célèbre architecte Corbin qui est à l’origine de la construction de la chapelle Saint-Michel, de l’église de Pléneuf et de bien d’autres monuments importants de la région. Pour les deux jeunes gens, les distractions sont nombreuses à l’époque : les bals, crochets, les courses de chevaux de Caroual qui attirent la grande foule avec ses élégantes aux grands chapeaux. Ils peuvent aussi se promener en amoureux au Vallon de Cavé ou admirer la superbe vue de mer en empruntant le chemin de fer pour se rendre à Pléneuf.
L’activité principale d’Erquy est alors l’exploitation des carrières, les grandes Carrières de l’Ouest et quelques carrières familiales dont le produit est destiné à la construction locale. Une de ces carrières est dirigée par une femme, Mme Amandine Lefebvre, qui force l’admiration de ses collègues masculins en maniant comme eux la barre à mine et la taille. Les ouvriers des carrières habitent sur le port, d’autres sont logés à Tu-es-Roc ou dans un bâtiment construit pour eux à la Fosse-Eyrand. A Tu-es-Roc habitent également quelques pêcheurs pratiquant la pêche aux maquereaux à bord de doris récupérés à la grande pêche des Terres Neuvas. Les femmes descendent au bourg, leurs paniers remplis de poissons afin de les vendre de porte en porte.
Louise et Joseph se marient en 1931 à l’église d’Erquy et s’installent en boucherie : la « boucherie du Centre», ainsi dénommée, est située rue Clémenceau face à l’étude notariale actuelle. Le métier de boucher n’est guère facile. A l’époque, il faut tuer les bêtes et souvent les faire venir de loin. Un commis va les chercher à Moncontour ou Loudéac et les ramène à pied, groupant les commandes des trois bouchers d’Erquy.
Si, à la maison on parle patois, ce n’est pas le cas au magasin car il faut servir les déjà nombreux touristes qui viennent prendre les bains à Erquy, propriétaires de quelques grandes villas sur le bord de mer ou locataires de meublés.
En 1932, l’on pressent l’arrivée d’une crise économique : le chômage augmente, les marins rentrent plus tôt de la grande pêche. Aussi les autorités municipales appuient fortement le projet d’une route touristique qui relierait Pléneuf à Saint-Cast, projet employant beaucoup de main d’œuvre et qui amènerait de nombreux touristes à visiter la région.
En 1931
En 1934, M. Cornu, qui sera plus tard Maire d’Erquy, est alors député des Côtes-du-Nord ; il sera à l’origine d’une décision gouvernementale qui fixera les vacances scolaires au 1er juillet dans toute la France et rendra service à toutes les stations de tourisme.
En juin 1940, les premières troupes d’occupation arrivent à Erquy et avec elles, le lot de misère et de malheurs de toutes sortes.
Le pauvre Joseph en fut une des premières victimes. Ayant acheté pour le transport de sa viande une superbe camionnette, il s’en alla en prendre livraison à Saint-Brieuc et, au retour, pressé de montrer à sa famille son bijou de véhicule, il fut arrêté à l’entrée de la Couture par un barrage de l’occupant qui lui confisqua son véhicule tout neuf.
C’est le début de l’occupation mais ceci est une autre histoire …
Contributeur: André Hosdez
Merci à Mme Poilpré pour ces confidences et souvenirs de cette époque.
2. Quelques anecdotes relatées par Mme Josette Poilpré:
Joseph Poilpré débute sa carrière de boucher à Paris et livre la viande à vélo dans les rues de la capitale. Quand il s’est installé à Erquy, rue Clémenceau, il possédait, comme toutes les autres boucheries rhoeginéennes, un abattoir. Celui-ci se trouvait à la Mare es Loups.
Très dynamique, après son travail, il aimait s’investir dans la vie d’Erquy et il fit partie d’une troupe de théâtre avec d’autres Rhoeginéens, bien connus de l’époque. La troupe jouait dans la salle de l’Armor-Ciné et pendant la guerre, la recette des spectacles était envoyée aux prisonniers de guerre.
Troupe de Théâtre de l’Amicale Laïque en 1942
Debout de gauche à droite : Joseph Poilpré – Marguerite Pansard – Georgette Pelletier – René Gouranton – Pierre Bouvet – Charles Rault – Fabien Pelletier – Monique Leguen;
Assis : Jo Velly – Julien Trégaro – Francine Bon
Il adorait dessiner ses propres cartes postales de correspondance en les illustrant des faits d’actualité du moment. Il en a beaucoup échangé avec M. de la Bourdonnaye.
Carte de 1984
Sa fille Josette se souvient que pendant les mandats de 1er Adjoint de M. Ruellan (de mai 1953 à mars 1965, avec M. André Cornu comme maire), qui aimait écrire, (il a d’ailleurs édité un livre sur Erquy), son père Joseph était conseiller.
Il dessinait et illustrait les écrits de son ami. Il avait ainsi redessiné de façon plus simplifiée le Blason d’Erquy à la demande de l’équipe de l’Armor-Ciné qui souhaitait qu’il soit reproduit sur la façade du cinéma par M. Rageot de Lamballe.
Le véritable blason d’Erquy avait été élaboré par M. Guyomard en 1965 pour la ville d’Erquy .
Sa signification est la suivante : le pêcheur et le cultivateur encadrent la sirène, dont le corps forme le E d’Erquy, et évoque un geste d’attirance. La devise rappelle l’origine du pays, ancienne colonie romaine appelée Reginéa (1) (la Reine). Les habitants d’Erquy s’appellent toujours Rhoeginéens. La corne d’abondance signifie qu’Erquy fait partie de ce qu’on appelle la ceinture dorée, c’est-à-dire la plus riche de la Bretagne (le littoral). Elle est remplie des produits du pays (poissons, crustacés, fruits, légumes, céréales, fleurs). A gauche, le marin évoque le port de pêche d’Erquy, qui occupe la moitie de la population. A droite, le cultivateur représente la culture, également très prospère. L’ensemble forme un symbole (armes de Bretagne et le sinople qui est vert rappelle la mer et la Côte d’émeraude…).
Tous nos remerciements à Mme Poilpré pour le prêt des documents et des photos et pour le partage des souvenirs de ses parents.
Contributeur : l’équipe de Mémoire d’Erquy
(1) On sait aujourd’hui que la référence à une supposée Reginea résulte d’une vieille erreur de lecture d’un document ancien.
Merci .Toujours très agréable de lire toute ces histoires sur Erquy ,ainsi que sur Mrs et Mmd Poilprè que j’ai connu dans ma jeunesse
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J’aime beaucoup votre blog. Un plaisir de venir flâner sur vos pages. Une belle découverte et blog très intéressant. Je reviendrai m’y poser. N’hésitez pas à visiter mon univers. Au plaisir.
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Trés interressant !! J’y apprend que ma grad tante Marguerite Pansart faisait du theatre !! Je l’ignorait !!
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J’adore votre blog, merci, c’est une très bonne idée !
Je viens d’y retrouver Georgette Pelletier, soeur de ma tante paternelle, je savais qu’elle faisait partie de la troupe de théâtre d’Erquy, j’ai un bon souvenir d’elle, toujours pimpante, gaie et agréable, c’était il y a longtemps …
Je viens régulièrement au Val André et à Erquy avec beaucoup de plaisir, et de jolis souvenirs d’enfance !!!
Chantal
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J’ai bien connu la famille pelletier à Porchefontaine quartier de Versailles Georgette et sa nièce Maryse qui a le même âge que moi nous étions à l’école ensemble et je les ai retrouvé sur Erquy
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Je me souviens également de son frêre Fabien Peltier bien sûre !
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