L’Armor-Ciné

L’Armor-Ciné a été créé par « l’Association Catholique des Chefs de Famille d’Erquy et d’Education Populaire » (voir l’historique de l’école Notre-Dame  – Hors-Série n°2, p 20).

1925 : Le Conseil d’Administration et le bureau ont autorisé la construction d’une salle de réunion dans la cour de l’école Saint-Pierre, celle-ci a été construite par un groupe de jeunes gens sans que l’association ait en aucune façon à participer à cette dépense, cette salle sera utile pour les réunions d’œuvres diverses entrant dans le but de l’association.

 1928 : Le Conseil d’Administration a fait l’achat d’un appareil cinématographique devenu indispensable pour les oeuvres d’éducation populaire qui rentrent essentiellement dans le but de l’association.

1944 : M. François Cabaret (recteur de la paroisse d’Erquy) a beaucoup travaillé à Erquy, il a surtout mis tous ses soins à développer l’enseignement chrétien dans les deux écoles Saint-Pierre et Notre-Dame. Avant son départ il loua la salle paroissiale pour en faire une salle de cinéma. Il ne se doutait pas des ennuis qu’il créait à ses successeurs.

1950 : La salle paroissiale louée par mon prédécesseur à un M. Cassagne pour en faire une salle de cinéma, fut cédée par ce dernier à deux jeunes gens qui au premier abord semblaient bien disposés. Ils ne tardèrent pas d’ailleurs à changer d’allure et ils en vinrent à manquer aux clauses du contrat.

C’est alors que l’Association des chefs de famille a décidé d’entamer un procès pour le recouvrement de la salle. Maître Poupart, avocat à Saint-Brieuc, et Maître Le Bigot, avoué furent chargés des intérêts de l’Association.

Après de longues démarches, enquêtes, plaidoirie (2ans) nous eûmes gain de cause à Saint-Brieuc. Nos adversaires firent appel à Rennes et finirent par abandonner. Nous n’avions plus qu’à entrer dans la salle. Le mobilier, qui nous appartenait en partie, fut vendu aux enchères, y compris les appareils. Nous achetâmes le tout et notre vieille salle Saint-Pierre devint l’Armor-Ciné.

1955 : Le Conseil d’Administration décide de remplacer les fauteuils et les appareils de projection et pour couvrir ces frais d’émettre un emprunt au nom de l’Association. La nouvelle salle est inaugurée le dimanche de Pâques.

Le cinéma fonctionne bien, c’est un lieu de vie où les habitants d’Erquy et des alentours aiment bien se retrouver les samedis soirs ou les dimanches, souvent ils ne savent pas quel film ils viennent voir, malgré que le programme paraisse sur la « MOUETTE » (bulletin paroissial, imprimé avec une imprimante à l’encre qu’il fallait nettoyer page par page) l’important c’est d’être là.

Dans le hall qui donnait sur la rue Foch, sur la droite en rentrant, dans un petit renfoncement c’est la caisse et à gauche un petit bar, tenu par M. et Mme Blouin, pas très bien achalandé, juste des bières, du vin rouge et des ‘Pschitt’ orange ou citron.

A la porte de la salle, M. Barbé contrôlait les billets, et comme il était menuisier il avait fait des petits carrés de bois numérotés qu’il donnait aux spectateurs qui sortaient à l’entracte se désaltérer ; souvent ils allaient à l’Eden ou il y avait plus de choix.

Les séances commençaient par les informations sur l’actualité, très appréciées, la télévision n’étant pas dans toutes les familles, quelquefois elles dataient un peu, il est arrivé que le résultat du Tour de France qui arrivait le 14 juillet sur les Champs-Elysées soit diffusé fin août, moquerie des parisiens, suivies d’un documentaire ou d’un dessin animé ensuite c’est l’entracte (durée minimum 20 minutes).

Il n’y avait pas de frigo; alors quelques minutes avant M. Blouin prenait son ‘Solex’ avec un cageot sur le porte bagage et filait chez Doudou chercher des esquimaux (crème chantilly glacée enrobée de chocolat), les placeuses bénévoles, Colette, Christiane, Marie et Annick les vendaient ainsi que des sucettes et aussitôt que le film commençait, M. Blouin reprenait son ‘Solex’ pour reporter les invendus.

Mme Blouin gérait les comptes, elle était intransigeante, une fois un spectateur qui avait subtilisé un esquimau, se voyant découvert l’avait mis dans sa poche, elle à dit à l’une des placeuses de rester à côté de lui, et c’est le pantalon qui a profité de l’esquimau !

Mais la salle est vétuste. Les projecteurs sont souvent en panne malgré les efforts de MM. Houzé et Jutin, ce qui provoque souvent des chahuts dans le fond de la salle, qui était occupée par de joyeux lurons, les demoiselles n’aimaient pas se mettre sur les sièges devant eux car il n’était pas rare qu’elles se retrouvent avec le papier de la sucette collé sur la joue, malheureusement Joël P. n’est plus là pour en témoigner, car il aimait bien faire ce genre de blagues.

1964 : La réunion du Conseil d’Administration de février s’oppose à la construction d’une salle de cinéma dans la cour de l’école Saint-Pierre. M. HUX, architecte à Rennes, fait un nouveau plan, prévoyant l’implantation de la salle dans le jardin à 3m50 des propriétés Dagorne et Durand, la dite salle devant comprendre 336 places (emplacement actuel).

 1964 : En mars, le plan de la nouvelle salle a été approuvée par la majorité des membres, pour un montant de 153.128,00 francs remboursable sur 15 ans pour le prêt du Crédit Hôtelier et sur 10 ans pour le prêt auprès des particuliers.

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1964 : C’est après une multitude de réunions et après que l’auto financement ait été démontré que les membres de l’association ont accepté le projet.

Le peintre M. Hamonet a fait don de toiles pour décorer la salle du cinéma ; dommage qu’elles aient été abîmées lors du transfert de salles.

Sur le fronton de la bâtisse, le blason « d’Erquy » représentent : une sirène dont le corps forme un E, un pêcheur pour la mer, un paysan pour la terre, et le panier de l’abondance,  peint par M. Rageot de Lamballe.

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1975 : Le Conseil d’Administration annonce des finances saines grâce au cinéma entre autres.

 1976 : L’abbé Sort, responsable de l’Armor-Ciné, note une augmentation de la fréquentation et bien sûr des recettes.

 1977 : Si la possibilité de faire appel à l’Armor-Ciné n’existait pas, comment les écoles pourraient-elles survivre ?

1979 : Depuis le décès de l’abbé Sort, Melle Barbé assure la gestion et la programmation de l’Armor-Ciné, elle fait appel aux bonnes volontés pour l’aider dans ce travail.

 1980 : Les entrées de l’Armor-Ciné s’équilibrent d’une année sur l’autre, ce qui prouve une bonne gérance de cet établissement qui représente le rapport essentiel dans la réalisation de nos activités.

Des dépenses indispensables sont prévues: chauffage: 29.000 francs, sonorisation: 29.000 francs.

Celles-ci étant heureusement remboursées à 90 pour cent par l’Etat, grâce au prélèvement de 1,80 franc sur chaque place vendue, qui nous est ristournée sous forme d’aide, ce qui permet aux salles de cinéma de pouvoir entreprendre tous les travaux d’entretien et de sécurité imposés par la loi.

Hélas pour 1981, il y a un très gros investissement, il s’agit des appareils de projection qui sont usagés et qui n’assurent plus une perfection d’image. Après vérification technique apportée par l’abbé Leforestier, il est voté à l’unanimité de faire le remplacement, coût 300.000 francs environ pour deux appareils ; ils donneront une plus grande facilité d’exploitation et une valeur supplémentaire à notre salle qui pourra ainsi continuer à vivre.

Félicitations à Mlle Barbé pour son dévouement et les résultats qu’elle a obtenus, grâce à sa compétence et à son énergie.

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 1983 : Mlle Barbé déclare avoir perdu 1.500 places, les films d’horreurs n’ont pas retenu l’attention.

 1986 : Modification du hall d’entrée afin de faciliter l’accès et accélérer l’entrée des spectateurs.

1986 : En fin d’année, Mlle Barbé, Directrice, fait un petit compte rendu de sa gestion, en raison des conditions atmosphériques durant la saison d’été, il a été constaté une perte de 2.000 places ; d’autre part afin d’améliorer l’entrée du cinéma il a été procédé à la réfection et à la modernisation du hall d’entrée présentant une importante dépense. Le remplacement des sièges est à prévoir et plus tard la modernisation de la salle. Il faut donc être prudent avant d’envisager d’autres grands travaux sur les autres bâtiments.

Il y a actuellement une très bonne équipe avec une bonne ambiance.

1987 : M. Edouard Besrest se souvient avoir rencontré l’abbé Hervé, lors du repas de baptême de son petit fils, lequel lui a demandé de bien vouloir imprimer le bulletin paroissial « La MOUETTE ».

1989 : Le matériel était devenu obsolète et j’ai demandé à M. de La Bourdonnaye, qui était le Président, d’acheter un ordinateur et une imprimante avec un logiciel de ‘P A O’ pour imprimer le bulletin paroissial, qui à cette époque avait 1.400 abonnés sur les 5 communes de la paroisse.

Melle BARBE m’a demandé si je pouvais également imprimer le programme de l’Armor-Ciné.

Je me suis donc retrouvé imprimeur ! Avant, les affiches étaient imprimées à Lamballe, chez Hercouët.

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L’achat de ce matériel a permis d’imprimer le bulletin paroissial, toutes les affiches et tous les programmes, ce qui a fait des économies pour l’Armor-Ciné.

2001 : A cette époque, j’ai arrêté de faire les affiches et les programmes.

2003 : En début d’année, après quelques années de ‘fermeture’, M. Daniel Jégu vint me voir pour me demander de le renseigner sur la marche à suivre pour relancer l’activité. J’ai accepté et nous avons rencontré Mme de Kerjégu (Présidente de l’Association Catholique des Chefs de Famille d’Erquy, propriétaire d’Armor-Ciné à cette époque) et M. Jean Mabundi (curé de la paroisse) pour leur demander leur accord.

D. Jégu, secondé par Géraldine, son épouse, et une équipe de bénévoles, a redynamisé l’Armor-Ciné. Sur la base d’une activité annuelle (et non plus saisonnière), avec un minimum de deux séances hebdomadaires, le redémarrage a lieu le vendredi 4 avril 2003 avec une première séance à 21 h 00 … pour la projection du film ‘Effroyables Jardins’ de Jean Becker avec, entre autres, Jacques Villeret et André Dussolier.

Ensuite une séance « Art & Essai » sera positionnée le lundi soir, et suivant la saison, une séance trouvera sa place le dimanche après-midi.

2012 : L’Armor-Ciné suit les progrès de la technique et passe au ‘numérique’ : nouveau projecteur, nouveau dispositif audio.

2014 : Le 1er juillet, l’Armor-Ciné est devenu municipal et une association s’est constituée pour le gérer.

Daniel Jégu est décédé le 28 mars 2017 ; sans son implication journalière, il n’y aurait peut-être plus de cinéma à Erquy. M. Dupré le remplace à la Présidence.

Et l’Armor-Ciné reste à la pointe de la nouveauté :

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Sylvie se souvient :

Dans les années soixante et soixante-dix, le cinéma l’Armor était déjà très important dans la vie des Rhoeginéens, encore plus après la fermeture du deuxième cinéma : l’Eden, situé Rue Foch.

Les séances avaient lieu pendant l’hiver uniquement le week end. L’été, elles étaient quotidiennes durant juillet et août. Les films projetés étaient souvent ceux qui avaient eu beaucoup de succès en ville les mois précédents (Le Jour le plus long, sorti en 1962, par exemple). Tous les après-midi, pendant cette période, il y avait une permanence à la caisse du cinéma pour pouvoir être sûr d’avoir une place le soir même, en particulier lorsque c’était un film à grand succès. La caissière cochait les places sur une grille et nous remettait les billets correspondant aux numéros cochés. Si mes souvenirs sont bons, dans les années soixante, la place était à 5 francs. Il n’était alors pas rare de voir les gens rentrer de la plage et venir alors chercher leur place de cinéma.

Le soir, les ouvreuses nous guidaient jusqu’à notre place et après une première partie consacrée à un documentaire, des actualités et un peu de publicité ‘Jean Mineur’ (déjà!!), ces mêmes ouvreuses passaient dans la salle vendre des esquimaux et des bonbons pendant l’entracte. Pendant cet entracte, sur le rideau baissé sur l’écran, on pouvait découvrir les annonces publicitaires des commerçants rhoeginéens.

Notre cinéma a gardé cette ambiance un peu particulière et si pleine d’histoires nostalgiques, chère à tous les amoureux des vieux cinémas.

 Maryvonne a aussi souvenir des deux premiers films vus dans le « nouvel » Armor-Ciné : Le Jour le plus long et Ben-Hur (de très longs films – 2h58 et 3h32 respectivement – pour l’enfant que j’étais !).

Les souvenirs de petite fille, dont j’ai encore les images en tête, évoquent mes grands-parents : ils nous emmenaient, mes cousins cousines et moi, tous les dimanches matin à la messe (c’était ma grand-mère) et tous les dimanches après-midi, au cinéma (j’avais une préférence pour … le cinéma !). J’étais chargée d’aller chercher une sucette pour tout le monde à l’entracte (sucettes « Pierrot Gourmand », à la cerise, au lait, et ?). Ces souvenirs sont un peu ma « madeleine de Proust ».

Jean raconte également :

La salle Armor-Ciné bordait notre école Saint-Pierre. C’était par notre cour que l’on accédait à la cabine de projection par un escalier en bois. En dessous, il y avait un local où était entreposé du matériel, son accès n’étant pas autorisé, mais sans serrure, cette remise attirait notre curiosité.

Nous avions ainsi, par l’ouverture entrebâillée, découvert la présence d’une bobine chargée de … film. L’idée d’une expérience germa tout de suite, un morceau de bande et une loupe récupérée sur une lanterne de char à bancs, feront l’affaire.

Ce qui fut dit, fut fait.

Un cercle d’élèves intéressés, d’abord, par la lecture à bout de bras de quelques images nous indiqua qu’il s’agissait du film « La Bataille du Rail » tourné en partie dans les Côtes-du-Nord ; ensuite, accroupis, l’opération destruction pouvait commencer … face au soleil, l’effet loupe, chauffa, cloqua le celluloïd qui finit par s’enflammer.

Ouah ! opération réussie …

Coup de sifflet de l’instituteur : fin de la récréation.

Contributeur : Equipe Mémoires d’Erquy

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2 commentaires

  1. Merveilleux souvenirs d’été quand nous allions pendant les vacances de Juillet à mi-septembre (avant de rentrer à Paris) dans les années 1960 (dix ans à l’époque) voir de merveilleux films, dont les Vikings tourné en 1958 au FORT LA LATTE avec Kirk DOUGLAS. De grandes reproductionsde tableaux du grand artiste qu’était Léon Hamonet décoraient ce cinéma.

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